J ’ai été demandé, le 12 mai dernier, de présenter une conférence à Cange sur la compréhension du thème de la journée mondiale des infirmières. Voici la réflexion qui a été dégagée. Le thème retenu cette année pour la journée mondiale des infirmières est : Une force pour le changement, une ressource vitale pour la santé. Par une analyse sémantique, nous arrivons à comprendre qu’il y a une ambivalence thématique.
Premièrement : Une force pour le changement : Cette force qui s’exprime de deux manières- le ratio infirmières/patients (23,23 pour 100 000h) nettement plus large que les autres prestataires et l’approche de proximité, familiarité et disponibilité au chevet des patients, amène tout droit vers un changement non-borné. Il s’enregistre dans un cadre global qui peut être social, économique, politique, éducatif et bien sûr sanitaire. Cependant, l’homme est au centre de tout changement. Mais, sans la santé que les infirmières doivent leur apporter, le changement sera hypothéqué. Même si les infirmières ne font pas directement ce changement, elles constituent la machine qui le fait avancer. Donc, cette année, le thème leur donne un rôle de leadership. Donc, il convient de se demander comment un leader peut conduire des hommes vers le changement s’il ne se change pas lui-même ? Nous pensons fermement que les infirmières en Haïti doivent opérer des changements chez elles : changement culturel par une rupture épistémologique et au niveau de la formation. Cette prémisse fait penser à une approche sociopolitique plutôt qu’à une approche sanitaire : l’infirmière est vue comme leader, décideur. Y-a-t-il déjà en Haïti, une infirmière ministre de la santé publique et de la population ? Pensent-elles à l’être ?
Deuxièmement : Une ressource vitale pour la santé : Cette approche est complémentaire à la première. Elle stipule que les infirmières ne doivent pas penser seulement mais travailler aussi dans la prise en charge des patients (approche de proximité et de quantité).
Cependant, cette ressource vitale peut être aussi mortelle quand son éducation elle-même n’est pas vitale. Plusieurs causes rentrent en jeu :
A) - Causes externes qui proviennent de la faiblesse de l’éducation au niveau secondaire, de la faiblesse économique et de l’infrastructure éducative.
B)- Causes internes qui proviennent du niveau académique de la formation universitaire délivrée dans la majorité des institutions en sciences infirmières. Cette formation, en plus du niveau académique non standard, se formalise dans une sorte de vertu liée à la culture du métier en négligeant l’intériorisation des caractéristiques et valeurs scientifiques telles l’objectivité, la quête incessante du savoir, l’observation, le dépassement de soi et le service. Il en manque la formation post-graduée.
En partant du principe qu’aucune profession n’a de limite que là où une autre profession commence et que surtout la science est connaissance mais connaissance jamais achevée puisque l’homme lui-même est un être en devenir, donc inachevé, nous pouvons en déduire que le thème de cette année « Une force pour le changement, une ressource pour la santé » fait injonction à toutes les infirmières non seulement de travailler comme ressource mais aussi de développer leur leadership, de décider les politiques sanitaires et de changer les autres, elles-mêmes et la santé en Haïti. Cependant, le thème de 2013, « combler l’écart » nous préoccupe. Est-ce qu’en Haïti nous parvenons déjà à combler les écarts ? Pour les combler, il faudrait :