Cette histoire allie harmonieusement des éléments divers qui ont contribué au succès de la mise en oeuvre de la méthodologie d’Amélioration de la Qualité (AQ) dans les sites supportés par le réseau Zanmi Lasante (ZL). C’est en effet, un alliage fait d’opportunisme, d’apprentissage des échecs, de révision et d’identification de nouvelles stratégies, de prise de conscience collective de divers acteurs qui a contribué à faire de ZL désormais une figure de proue en matière d’application des initiatives d’AQ sur la scène nationale et un acteur qui fait son bonhomme de chemin au niveau international. Ce document a pour but de faire dérouler en plusieurs séquences, toute la scène de cette entreprise à ZL qui a débuté en 2007 pour aboutir à des succès consécutifs durant les deux dernières années écoulées.
Zanmi Lasante: est une ONG oeuvrant en Haïti depuis plus de 30 ans dans deux départements et 10 communes pour supporter un total de 12 institutions sanitaires dont 10 sont publiques. Dans cette zone de desserte, ZL couvre une population de plus de 1.2 millions d’habitants. Cette ONG supportée par l’organisation soeur, Partners In Health, basée à Boston, est un partenaire privilégié du MSPP. La devise de ZL étant d’offrir une option préférentielle pour les pauvres, c’est-à-dire, de permettre à ce que les plus pauvres, souvent les plus malades, aient accès à des soins de qualité standards et en conformité avec les avancées scientifiques contemporaines.
Tout a commencé à ZL en Avril 2007 avec le lancement de la phase pilote de l’application de la méthodologie HIVQUAL à travers le pays par le Ministère de la Santé Publique (MSPP) et CDC. Parmi les 19 sites retenus pour cette phase, 2 sites de ZL/PIH furent choisis, il s’agissait du centre de santé la Colline de Lascahobas et du centre de santé Charles Colimon de Petite
Rivière de l’Artibonite. Se basant sur le succès de l’implémentation de cette méthodologie dans ces 2 sites, l’institution s’en est appropriée dès le départ et commençait à étendre son application aux 9autres sites du réseau. Beaucoup de prestataires ont pris part à des séances de formation, et ceux qui étaient les plus sensibilisés ont commencé à travailler sur des projets d’AQ dans leurs sites de façon sporadique.
Malgré la détermination de certains membres du staff qui sont spontanément tombés amoureux de cette approche pour adresser les problèmes liés à la qualité des soins dans leurs sites, cet élan naturel non structuré n’a pas suffi à produire des résultats et des effets palpables sur le système. La stratégie consistait à utiliser ces prestataires comme de véritables porteurs du germe HIVQUAL pour contaminer positivement le reste du staff et promouvoir cette culture de mesure de la performance pour améliorer la qualité des services offerts. C’est ainsi que pour les trois années consécutives 2008 à 2010, l’institution n’a pas su faire bonne impression durant les forums (tous les 6
mois) organisés à l’échelle nationale, et bien que certains sites se soient faits représentés, l’institution fut sortie bredouille plusieurs fois et ceci fut à l’origine de frustration récurrente et démotivante. Cependant loin de baisser pavillon face à ce contexte défavorable le Département de Suivi/Evaluation et d’Amélioration de la Qualité (DESAQ) de ZL avec le support de CDC et de MSPP a développé un plan d’extension de l’application de la méthodologie HIVQUAL dans tous les sites. Ce plan comprenait, la formation du personnel sur la méthodologie, un ‘’task force’’ réalisé dans 5 des sites pour tenter d’adresser les problèmes de qualité de données sur notre EMR, l’adaptation de la définition des 10 indicateurs entre autres. Malheureusement la survenue du tremblement de terre a eu un impact réel sur ce plan et nous a poussé a relégué au second plan cette priorité, et encore à la fin de l’année 2010, soit en octobre, l’épidémie de choléra qui a frappé de plein fouet notre zone de desserte nous a portés à focaliser notre énergie ailleurs.
Comme un beau temps qui survient après la pluie l’année suivante, 2011, a vu l’éclaircissement de notre horizon avec une série d’évènements qui a créé un momentum favorisant l’implémentation à succès des initiatives AQ dans tout le réseau. Parmi les facteurs favorables on peut citer : L’ajout officiel de la composante AQ au niveau de l’unité DSEAQ, l’expansion de cette méthodologie à près de 59 sites au niveau national, une meilleure sensibilisation et implication de certains acteurs clés du système à ZL, une assistance technique de l’unité homologue à PIH, l’initiative de l’audit de la qualité et de la mise à jour systématique des données sur EMR pour principalement 5 indicateurs clés, le recrutement d’un officier d’AQ chargé de la mise en oeuvre effective de la méthodologie dans l’ensemble du réseau etc. Ce combo de divers éléments nous permis de mettre en place le minimum d’infrastructures nécessaires à travers les comités d’AQ dans les sites qui ont accouché précocement des projets AQ à succès. Ceci nous a valu de remporter dès l’année suivante les deux premiers prix au niveau national de projets d’AQ implémentés à succès et suivant la méthodologie HIVQUAL.
Pour rendre chronique la fièvre d’intérêt et de motivation pour les initiatives d’AQ au niveau des sites du réseau ZL, le DSEAQ avec l’appui d’autres départements de ZL, notamment le département clinique, le MSPP et le CDC s’est évertué à concevoir et mettre en oeuvre des stratégies et activités visant à garder allumée la flamme embrasante de la méthodologie AQ consumant l’ensemble du réseau au cours de l’année 2012. Ces stratégies et activités ont été constituées de et sans se limiter à : la formation et l’encadrement continus du personnel en matière AQ, le maintien des comités AQ dans les sites; le renforcement de cette composante au niveau du DSEAQ de ZL avec le recrutement d’une infirmière et d’un gestionnaire de données dédiés à cette composante; les dispositions prises pour maintenir des données de qualité sur le système EMR; et commeune cerise sur le gâteau l’organisation du sommet AQ sur une base semestrielle, et en prélude de celui organisé au niveau national. Ce sommet constitue depuis déjà deux ans à ZL un évènement qui crée un espace académique favorable aux échanges et à la vulgarisation des résultats obtenus, et pardessus tout de sensibilisation des prestataires sur la nécessité de s’évertuer à fournir des soins de qualité aux patients. Qui a bu, boira et une fois que ZL a pris goût aux succès de la mise en oeuvre des initiatives AQ nous avons pour le comble de remporter les deux premiers prix dans chacun des 2 autres forums organisés successivement au niveau national, réalisant comme le terme anglais l’exprime mieux un ‘’back to back to back’’. Notons aussi que dès 2012 cette méthodologie a été appliquée dans notre réseau à des domaines autres que le VIH, matérialisant le changement de la terminologie HIVQual en SantéQual (HealthQual). Ces succès consécutifs constituent un tremplin pour aider l’institution à mettre le cap sans regarder en arrière sur la création d’une culture AQ en vue de fournir des soins de qualité à la population desservie.
Il est difficile d’instituer tout changement, surtout dans le contexte complexe que représentent les organisations de santé évoluant en milieu rural d’un pays à ressources limitées comme il en est le cas pour ZL/PIH. En témoigne, en effet, notre périple pour arriver à mettre en oeuvre sur plus de cinq ans un programme d’AQ à succès dans ce réseau. Il faut du temps, de la persévérance pour trouver dans toute institution des gens à qui inoculer de l’intérêt pour les initiatives AQ et qui ne jurent que par la satisfaction de la qualité des services de santé devant être reçus par les patients.
Au-delà de ces succès consécutifs cristallisés dans les prix remportés au niveau national et des opportunités de présentation de ces travaux sur la scène internationale, ZL entend continuer à étendre cette approche dans tous les domaines de soin (SantéQual) et à l’associer à l’aspect des techniques de sureté des soins et d’étude de coût appliqué à l’amélioration des processus pour créer un tout compréhensif visant à contribuer à l’objectif ultime de l’organisation et du MSPP consistant à offrir des soins de qualité standard à un coût dérisoire à la population haïtienne.